Parce que l’agilité à l’échelle est l’un des enjeux cruciaux des grandes organisations, nous avons interrogé quatre experts afin de constituer un ebook, permettant de comprendre les apports de l’agilité à l’échelle et SAFe. L’article suivant est un extrait de cet ebook et nous permet de déterminer le choix du framework d’agilité à l’échelle.


Laurent Charles
Laurent CHARLES, CEO et co-fondateur d’Enalean (Tuleap)

Privilégier des frameworks structurant, qui donnent les bonnes pratiques

Il existe plusieurs framework qui vous donneront un cadre de travail. Citons par exemple SAFe (Scaled Agile Framework), LeSS, Scrum@Scale, et d’autres, vous avez le choix.

Ces frameworks structurent des pratiques issues de l’expérience de ce que pourrait être une entreprise agile idéale. Ils regorgent de bonnes pratiques et peuvent vous guider vers la méthode que vous pourrez adopter ou dont vous pourrez vous inspirer.

A titre d’information, voici les framework les plus utilisés en 2020 :

jean-claude delagrange coach agile
Jean-Claude DELAGRANGE, coach agile

Choisir selon les besoins des équipes

Le choix dépend des affinités des équipes et des managers avec les valeurs et principes de l’agilité, ainsi que de l’engagement des décideurs dans la transformation :

  • SAFe permet de garder une structure managériale forte et des décideurs impliqués, le framework contraint fortement l’organisation agile (rôles, jalons, organisation des équipes, modes de décision…) ; SAFe rassure les entreprises qui ont tardé à engager leur transformation
  • LeSS, ou d’autres organisations à l’échelle imaginées avec des pratiques adaptées au contexte (Sociocratie, NeXXus..) sont indiqués quand la transformation a lieu en cours de projet, que la décision est déjà fortement décentralisée, et que les équipes agiles sont matures ; la transformation, plus auto-organisée, impliquera moins le management, mais devra faire ses preuves, avec un soin particulier à la communication sur la transformation véritablement réalisée.
Alexandre Cuva coach agile
Alexandre CUVA, coach agile et dirigeant de SoCraAgile

Être aidé d’un coach pour choisir la solution adaptée

Nous avons une grosse expérience de la mise en place de la mise-à-l’échelle des organisations. Que ce soit SAFe, Scrum@Scale, LeSS ou autres, chacun ont un dénominateur commun : les équipes Scrum stables, autour d’un produit. On n’arrive pas à mettre à l’échelle sans un minimum de discipline sur l’élément le plus simple. Puis l’organisation peut se tourner sur l’un ou l’autre de ces frameworks, voir une version hybride.

Avec l’accompagnement d’un coach pragmatique, celui-ci vous aidera à choisir une solution adaptée à votre besoin d’organisation. Dans l’un de notre dernier grand projet de transformation dans le domaine de l’industrie horlogère, notre client nous a contacté pour une transformation SAFe. Après discussion avec l’un de nos experts, nous avons compris que le besoin était davantage pour “faire comme les autres” et “nous voulons des PI planning”, que de vraiment utiliser SAFe. Aujourd’hui nous le suivons sur une adoption de Scrum@Scale, avec des Release planning dans le format d’un PI Planning. Rien ne l’empêchera de passer à SAFe si c’est vraiment son choix.

Il est donc vraiment important que vous fassiez votre choix avec un coach, qui vous aidera à choisir le framework adapté à votre environnement et ne pas forcément suivre la mode.

Laurence Hanot coach agile
Laurence HANOT, coach agile chez Zenika

Donner de la cohérence et adapter à son environnement

Pourquoi choisir ? De mon point de vue, il faut aller chercher les pratiques et rôles qui aideront à atteindre les objectifs de transformation et s’ils n’existent pas les inventer. C’est un peu provocateur mais je le pense réellement : annoncer que l’on va déployer telle ou telle méthode est une erreur qui mène à tous les coups à une application “by the book” alors que le principe même de l’agilité est l’adaptation à un contexte. Comme je le dis souvent, je n’ai jamais vu la même agilité déployée dans deux équipes, départements, entreprises différentes et heureusement !

Ceci dit, cela peut aider de choisir, au moins au début, une direction, le framework “principal” sur lequel on va se baser. Mais attention au discours qui accompagne ce choix ! On va aller chercher dans cette boîte à outils là, dans ces principes là mais ça ne veut pas dire qu’on va tout prendre, ni qu’on va s’empêcher de regarder ailleurs.

Je dirais que 2 de mes plus grosses missions sur ces 3 dernières années sont basées ou inspirées de SAFe mais avec 2 approches différentes :

  • Une mission menée sur 2017-2018 (département de 50 personnes) où on a effectivement utilisé Scrum pour amener de l’agilité dans 5 équipes d’un même département, petit à petit puis où la question de mise à l’échelle est devenue cruciale pour coordonner ces 5 équipes et le reste du département (management et rôles transverses). Nous nous sommes alors basés sur SAFe pour amener cette synchronisation et ce cadencement : synchronisation de l’Agile Release Train et PI Planning uniquement puis nous avons travaillé sur des rôles “maison” pour animer le tout ;
  • Ma mission actuelle, depuis 1 an (programme d’environ 250 personnes) où une tentative de déployer SAFe au niveau Solution a été faite sans accompagnement et uniquement “par le haut” initialement et où il a fallu déconstruire les mauvaises pratiques puis reconstruire “par le bas” (SAFe Essential avec des adaptations bien sûr) afin de solidifier les fondations et d’impliquer réellement les équipes et pas uniquement leurs représentants. Nous menons aujourd’hui de front ce chantier avec ceux des étages supérieurs Solution et Portfolio dont nous avons aussi besoin pour structurer et gérer la complexité de ce programme. Ces niveaux-là permettent également d’adresser les problématiques au niveau du top management et de les amener à entrer dans cette démarche agile (priorisation du portfolio, ajuster les roadmaps de mise sur le marché, livraisons incrémentales, implication des équipes dans les choix et décisions, etc…).

Dans la communauté agile française, il est fréquent de voir des débats passionnés entre défenseurs de SAFe et de LeSS. Oui, ces approches sont différentes : SAFe est très descriptif et prescriptif, là où LeSS est simple et laisse beaucoup d’autonomie aux
équipes pour s’organiser. Mais elles ne sont pas opposées si on n’applique pas les choses à la lettre et peuvent même être complémentaires : aujourd’hui, nous proposons des pratiques issues de LeSS dans notre Agile Release Trains SAFe !

Les contraintes de toute méthode viennent uniquement de la façon dont on les applique, personne ne vous oblige à implémenter tout ce qui y est décrit. Par contre, expliquer dans quel but on utilise telle ou telle pratique et donner de la cohérence et de la consistance à une démarche d’agilité à l’échelle est primordial.


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